dimanche 7 novembre 2010

Liberté de la presse : pas de quoi se la péter.

 Période de merde pour la France. A quel point de vue, me demanderez-vous ? Pas qu’un. Mais, aujourd’hui, on va regarder là où ça fait mal : la liberté de la presse.
Quelques faits pour commencer : selon l’ONG Reporters sans Frontières, le journalisme n’a jamais été en aussi mauvais état en France qu’aujourd’hui. Cool. Dans  le classement annuel des pays où la presse effectue son travail dans de bonnes conditions, la France n’a cessé de dégringoler depuis 2007. En 2010, la France a donc l’insigne honneur d’atterrir à la 44e place du classement et d’être placée derrière la Papouasie – Nouvelle Guinée, le Surinam ou encore la Jamaïque. Avec tout le respect que je dois aux papous de Nouvelle Guinée, aux compatriotes d’Edgar Davids et aux rastafaris, on n’a pas l’air cons déjà.

Vous pouvez vous moquer mais, au moins, lui, il respecte la liberté de la presse.

Ce classement est établi à partir de critères plus ou moins obscurs pour le commun des mortels. Et pourtant, pas besoin d’être un putain de génie pour arriver au même constat, surtout ces dernières semaines. Une fois de plus, l’affaire Bettencourt schlingue et balance ses effluves depuis la tête de l’état jusqu’aux journalistes chargés de l’enquête : simultanément, trois ordinateurs ont été volés dans trois rédactions différentes. Une attaque groupée sur les informations rassemblées par les journalistes. Effectuée avec compétences mais sans aucune discrétion. Comme pour intimider ou pour démontrer que personne n’est hors de portée (à ce sujet lire l’analyse de Daniel Schneidermann).
Aujourd’hui, bien malin celui qui pourra affirmer haut et fort qui est responsable sans se prendre une attaque pour diffamation dans la vue. Tout le monde a sa petite idée mais ça ne suffit pas. S’il y a une chose de sûre, c’est qu’il ne fait pas bon être journaliste d’investigation sur les sujets qui gênent tout là-haut. Certains doivent commencer à faire dans leur slip et à mettre en place quelques techniques à la mode Spooks ou Alias. On les comprend.

Quand je vois ça, je me dis que le journaliste a intérêt à être un être d’exception pour passer entre les gouttes : comme le sont tous ceux qui font leur métier dans les plus beaux pays du monde (Chine, Russie, Birmanie…).
Des héros, tous ceux là. Les modèles de leurs camarades de fiction : les Superman, Tintin, the Question*, Spider-Jerusalem et autres Lone Gunmen. Fascinant par son métier autant que par ses qualités, le journaliste est un modèle privilégié du héros combattant pour la justice et la vérité. Dans les comics et les séries, le journaliste est donc un défenseur, un protecteur, celui qui par ses talents ou ses pouvoirs peut aller là où les autres ne sont pas admis pour mettre en lumières les noirs secrets de ses ennemis ou de la société.

Le journaliste emmerde le pouvoir et c'est son boulot. Merci Spider, tu peux lâcher la pose.

Pourtant, dans notre bonne vieille et triste réalité, c’est le contraire : les journalistes doivent être protégés pour faire leur boulot d’intérêt général. Aux dernières nouvelles, la formation en école de journalisme n’incluant pas de savoir résister aux balles ou d’être champion de muay thaï, on s’attend à ce que ce soit l’Etat qui garantisse les conditions nécessaires au journalisme. Et, il semblerait qu’on soit bien cons de s’y attendre justement car, selon nos dirigeants, ça ne les concerne pas.
Et ça, ça met en rogne quand même. On ne va pas demander à ce qu’ils nous révèlent sur un plateau qu’ils espionnent, écoutent voire cambriolent mais on aimerait bien quand même qu’ils aient un minimum d’hypocrisie pour avoir l’air choqués. C’est sans doute trop demander…
Reste seulement à espérer que les journalistes arriveront à s’en sortir seuls voire contre tous. Vous y croyez, vous ? Moi j’ai du mal depuis qu’au JT de 20h de France 2 mercredi soir, l’information sur les accusations d’écoute du Canard Enchaîné a été traitée en tant que brèves à 20h20, sans images et sans aucun putain de commentaire. Merci Pujadas pour votre engagement en faveur de vos confrères.

C'est sûr qu'en interview, y a pire.

Car, oui, il n’y a pas que le journaliste héros, curseur de la démocratie en bonne santé, il y a aussi le journaliste carpette qui lit les communiqués du pouvoir.
A méditer.

*Je viens de me terminer la relecture du second recueil de la série et c’est toujours un vrai bonheur de lecture. Dennis O’Neil a vraiment la plume pour aller chercher les sujets sérieux (contamination des sols, républiques bananières et autres) et y confronter son héros de plus en plus philosophe. Un régal, je conseille.

3 commentaires:

  1. Dire du mal de Pujadas ? Mais vous n'y pensez pas, c'est du Mélenchonisme caractérisé !

    RépondreSupprimer
  2. C'est clair que j'ai pensé à Mélenchon en écrivant le billet et je me disais qu'il l'avait quand même bien cerné. C'est sûr qu'en gueulant sur tout ce qui passe, il gueule aussi sur ceux qui le méritent tout particulièrement. Enfin bon, peut-être que je deviens juste populiste moi aussi ^^
    Mais il suffit que je repense à la dernière interview de Sarko et à la prestation affligeante de Pujadas... et ça m'énerve.
    je devrais faire comme Zaït et essayer de l'oublier :)

    RépondreSupprimer